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Deux articles de ma main (La Pensée n°413), et deux vidéos de présentation

Le dernier numéro (413, 2023/1) de la revue La Pensée publie deux articles de ma main, qui appellent quelques commentaires. Pour commencer, l'un d'eux, intitulé « De la richesse, et de la nécessité de la définir », est la première moitié d'un texte en deux parties, la seconde devant figurer dans la prochaine livraison (fin juin). Les fidèles lecteurs de ce blog ne seront guère surpris par son contenu, qui reprend mes réfelexions menées dans plusieurs billets ici-même, à partir des acquis apportés par les analyses d'Alain Testart, mais aussi, à mon sens, des problèmes qu'elles posent et que je me suis efforcé de résoudre.

L'autre texte, en revanche, sort des sentiers que j'avais battus jusqu'à présent. Sous le titre, « une évolution désorientée », il s'efforce de mettre en perspective une manière de considérer l'évolution qui s'est peu à peu imposée au cours des dernières décennies, que ce soit en matière biologique ou sociale. J'avais en effet été frappé depuis longtemps par le parallélisme des raisonnements qui réfutent l'existence de toute forme de tendance générale, sans parler de progrès, et qui s'emploient à dénoncer un point de vue jugé arbitrairement situé (respectivement « anthropocentrique » et « ethnocentrique »). Il y a dans cette posture, que l'on retrouve du Claude Lévi-Strauss de Races et histoire aux récents écrits se réclamant de l'anthropologie anarchiste, en passant par le Stephen Jay Gould de La vie et belle un rejet commun du macro-déterminisme, et une volonté de privilégier le rôle omnipotent de la contingence, qui ne me paraît pas de nature à éclairer ce que l'on veut étudier - et pire, en matière sociale, de faire perdre tout repère à ceux qui veulent agir dans le sens de ce qu'on n'ose plus appeler le progressisme.

J'avais commencé à noircir quelques dizaines de pages sur le sujet il y a déjà plusieurs années, mais elles ne me satisfaisaient pas, et je n'avais jamais eu le courage d'essayer d'en faire un véritable livre. La proposition de la revue La Pensée, à l'occasion d'un numéro sur le relativisme, m'a donné l'occasion de reprendre mes réflexions et de leur donner forme. La gageure a été de contracter l'exposé pour le plier aux dimensions exigées ; peut-être l'argument est-il formulé un peu trop abruptement par moment, et peut-être la clarté (ou la nuance) en a-t-elle souffert. En tout cas, je serais ravi que ce texte suscite des réactions, fussent-elles pour le contredire !

En prime, voici deux vidéos réalisées par la revue, dans lesquelles je présente ces textes en quelques mots.

 

 

8 commentaires:

  1. La malédiction des tirets a encore frappé : le premier lien est invalide.

    Il faudrait aussi ajouter un lien vers le deuxième article, à savoir https://www.cairn.info/revue-la-pensee-2023-1-page-16.htm

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    1. Je viens de piger pourquoi ça merdait. En tout cas, normalement, c'est corrigé. Merci de ta bienveillante vigilance !

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  2. Bonjour, Christophe.
    Tu poses la question du « sens de l'histoire » et je ne sais pas si elle relève de l'anthropologie. Mais tout est dans tout et, comme tu le dis, « l'anthropologie anarchiste » n'hésite pas à répondre à la même question. En tous cas, une question passionnante. Peut-être même la seule qui vaille. Je vois que tu as prévu une soirée à la Chapelle-aux-saints avec J.-P. Demoule : c'est pas loin de chez moi, et je me fais un vrai plaisir de venir vous écouter.
    Pour ma part, je promeus la notion de « stupid design ». Oui, l'évolution biologique et sociale a un sens : celui de la marche vers un suicide collectif. Il a fallu une convergence incroyable de hasards pour permettre l'éclosion de la vie, puis de la conscience, puis d'une technologie, etc., et le résultat inévitable, c'est de se faire sauter le caisson. C'est ce qu'avait prévu de toute éternité le Grand Plat de Nouilles pastafarien.
    Au passage, ma théorie explique pourquoi nous n'avons pas de nouvelles des petits hommes verts : dès qu'une civilisation extra-terrestre atteint un niveau technique suffisant pour nous envoyer des fusées (ce qui suppose une organisation psychique et sociale orientée vers l'exploration, donc l'idée de conquête au moins intellectuelle, portée forcément par un « animal politique »), elle a aussi l'envie et les moyens techniques de se suicider, et elle ne rate jamais cette occasion. Ça s'est produit des MILLIARDS de fois, dans l'histoire du cosmos !
    Bon, je blague, hein.
    Marc Guillaumie.

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    1. Pas sûr qu'on ait le temps d'aborder ces questions dans la table ronde avec les collègues (le sujet est spécifiquement la question des « certitudes » en matière de préhistoire). Mais quoi qu'il en soit, avant, pendant ou après, ce sera un plaisir de faire ta connaissance ! (et gloire au Monstre en spaghetti volant).

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  3. Merci pour ces réflexions ! Quand je lis tout cela je pense aux analyses de Norbert Elias qui lui aussi a tenté de penser (le moins mal possible) le "changement orienté" et quelque chose comme l'évolution des sociétés. Un article parmi d'autres : https://www.erudit.org/fr/revues/philoso/1998-v25-n2-philoso1807/027489ar.pdf

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  4. Et si les astrophysiciens (au moins Eric Chaisson, Hubert Reeves, François Roddier...) avaient raison ? Il n'y aurait qu'une Evoution, des particules subatomiques aux sociétés humaines en passant par la biologie.
    Voir le graphique de Chaisson, fig. 4 ici ; https://www.lesauvage.org/2016/03/levolution-et-les-ctenophores/. Cette vision a au moins le mérite de réintégrer pleinement le temps.

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    1. Hello Ghislain,

      Je ne suis pas spécialiste, mais les arguments développés dans cet article sont assez étranges.

      Prenons cet exemple d'Hubert Reeves :

      « Reeves m’a fait entrevoir que l’évolution avait pu commencer avant la vie, avec des paliers de complexification qu’on appelle des émergences (5, et fig. 3). Exemple d’émergence emprunté à cet auteur : si on assemble les lettres b, e, l, u d’une certaine façon on peut obtenir le mot bleu, une combinaison plus complexe qui prend un sens tout différent de la collection de lettres initiales et que l’on ne pouvait prédire en regardant seulement ces lettres – on peut remplacer les lettres par “acides aminés” et le mot bleu par “protéine” par exemple. »

      Faut-il déduire de cet exemple que Reeves pense que les lettres ont existé avant les mots ? En réalité, les alphabets ont plutôt été conçus pour écrire des langues, donc des mots, qui existaient déjà l'oral. Il n'y a pas de sens à parler d'une pyramide du langage qui « se construit » progressivement (de même, aurait-on inventé les mots avant de leur trouver un sens ?).

      Autre affirmation audacieuse :

      « il y aurait [sic] une troisième loi de la thermodynamique qui serait la tendance de l’univers à augmenter la dissipation d’énergie rapportée au poids de matière »

      Plus simplement, il y a une diversification croissante des formes, qui tend statistiquement à produire des extrema de plus en plus grands. Si je tire au hasard 1000 nombres, le plus grand de ces nombres sera presque à coup sûr plus grand que si je n'en avais tirés que 10.

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  5. Marc Guillaumie08 mai, 2023 13:35

    Merci pour cet article très intéressant.

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