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Une (très bonne) conférence sur les origines de la guerre

Il y a quelques mois de cela, j’ai été contacté par un collègue qui travaillait à un ouvrage sur les origines de la guerre. Il voulait vérifier certains éléments concernant les données ethnologiques, en particulier celles qui concerne les sociétés de chasseurs-cueilleurs. J’ai très rapidement vu que j’avais affaire à quelqu’un d’extrêmement sérieux, pour qui la science commençait par le fait de vérifier scrupuleusement ses informations et ses raisonnements, et à ne pas se contenter d’à-peu-près. Notre communauté de pensée ne s’arrête pas là : Hugo Meijer, puisque c’est de lui qu’il s’agit, tient à formuler des propositions claires et à avancer des hypothèses qui peuvent être discutées, c’est-à-dire infirmées ou confirmées. C’est loin d'être toujours le cas, et en sciences sociales, ainsi que le dit Jean-Loïc Le Quellec dans une de ses boutades favorites, on a trop souvent l’impression de lire ou d’entendre des propos qui ne sont « même pas faux ». Il est bien dommage que ces contacts se soient noués à peine quelques semaines après le colloque toulousain consacré aux conflits dans les sociétés sans richesse : Hugo y aurait naturellement eu sa place, et il y aurait constitué un apport précieux.

Toujours est-il que ce collègue a récemment été invité par Jean-Jacques Hublin, du Collège de France, pour exposer ses travaux qui, dans quelques mois, vont donner lieu à une (épaisse) publication en anglais. Sur le fond, cette conférence est tout à fait intéressante et sur la forme, d’une grande clarté et accessible à tous les non-spécialistes : je ne saurais trop en recommander le visionnage.

Les points abordés recoupent en partie ceux que je traite dans mon propre bouquin à paraître, et on pourrait naturellement tirer bien des fils à partir de son propos. Les données archéologiques pour les chasseurs-cueilleurs, en particulier, d’une interprétation si difficile, appelleraient une discussion serrée, qui ne saurait être menée dans le seul cadre d’un exposé oral.

Quoi qu’il en soit, si j’avais une seule remarque à faire, c’est que la dualité guerre / paix (ou conflit / collaboration) peut et doit être affinée pour décrire les relations entre des groupes. En particulier, les humains ont inventé des « conflits pacificateurs », ces confrontations que j’appelle résolutives et conventionnaires, qui possèdent un caractère judiciaire : ce sont celles où, dans un cadre convenu par avance entre les deux parties, la violence a pour objet de vider le ressentiment et de permettre aux protagonistes d’en revenir à des relations plus apaisées.

Un dernier détail : les plus attentifs noteront quelques bizarreries dans les noms de certains peuples figurant sur les diapositives projetées par Hugo. Ce sont de simples coquilles, qui n’enlèvent rien au sérieux du propos.

5 commentaires:

  1. Je l'ai visionner ce matin ..

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  2. Merci, très bonne référence. En voici une autre un peu plus « grand public » sur le sujet de la guerre chez les animaux: L. Bollache, Quand les animaux font la guerre (2023) / https://www.youtube.com/watch?v=WVqPamM-6ng. Il semble qu'on dépasse pas l'imaginaire de la dichotomie Rousseau/Hobbes lorsqu'on parle de ces sujets.

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    1. Ma critique sur ce livre : https://www.afis.org/Quand-les-animaux-font-la-guerre

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  3. C'est dense, il aborde vraiment beaucoup d'aspect différents

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  4. La psychologie évolutionnaire est une discipline particulièrement rejeté par les scientifiques fréquentant ma bulle de filtre et j'en suis vraiment très étonné car, par exemple, ce que fait Hugo Meïjer semble parfois en être. D'après toi ce rejet te semble t il justifié ?

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